Armes : heureusement que la France n’est pas l’Amérique ? – Le Regard d’Éric de Riedmatten
Par Eric de Riedmatten
Mai 2022
Les États-Unis sont-ils devenus fous ?
Fous avec leur obsession des armes à feu. Les carnages à répétition devraient susciter l’indignation et décider la mise en place immédiate d’une nouvelle législation. Interdire les armes aux moins de 21 ans par exemple ?
La droite républicaine s’y oppose.
L’Amérique se retrouve donc avec le triste record de tués par balles.
20 000 morts en 2021 hors suicides.
La tuerie d’Ulvade au Texas avec les 19 gamins tués par un adolescent porteur d’un fusil semi-automatique n’est que la énième tragédie de ce type. Personne n’a oublié le drame de Columbine en 1999, dénoncé à l’époque par Michaël Moore dans un film qui aurait dû provoquer une onde de choc.
Eh bien non. Joe Biden après tant d’autres reste impuissant face au lobby des armes. Mais que faire dans un pays qui vend 20 millions d’armes à feu chaque année ?
La réponse est à Houston. Il suffisait de suivre le 27 mai la convention annuelle du premier lobby américain des armes, la National Rifle Association (NRA), pour comprendre qu’une réforme est impossible.
« Vous ne pouvez pas blâmer les Américains » disait un retraité qui possède 50 armes chez lui.
Chez les Américains, l’armement est inscrit dans les gènes. D’ailleurs, les membres du lobby se disent tous pacifiques. Et d’ajouter : « Les tueurs ne craignent pas le juge, ils ne craignent pas la police, ils devraient avoir peur des victimes auxquelles ils s’en prennent ».
Et là, tout est dit.
Car en effet, si les enseignants de l’école d’Uvalde, si les agents de sécurité environnants et si les parents d’élèves avaient eu une arme pour riposter, le drame (selon les lobbyistes) aurait été évité. Et que dire de la police locale qui a hésité à intervenir, et qui a reconnu sa faute.
On se dit que le continuum aurait eu pleinement sa place pour éviter le carnage.
UNE ARME POUR TOUS, SEULE RÉPONSE À L’INSÉCURITÉ ?
Et l’on revient à une question qui se pose depuis des années.
L’auto-défense est-elle la seule réponse à l’insécurité ?
Le film de Clint Eastwood « Gran Torino » sorti en 2008 nous aidait à comprendre il y a déjà 14 ans, que l’arme aux Etats-Unis est la seule arme contre la menace et la mort.
Pays de cow-boys direz-vous ? Sans doute.
Certes ce sujet est terriblement sensible. Mais si on ramène cette question à la France, Samuel Paty aurait-il-pu sauver sa peau s’il avait été armé comme le sont les Américains ?
Oui mais alors s’ouvre la question de l’escalade abominable d’un type de violence qui répond à la violence.
Heureusement que la France n’est pas l’Amérique.
Que ferait-on si à la moindre altercation dans une rue (au feu rouge ?), on vous tirait dessus ?
EN FRANCE, PORT D’ARMES ÉLARGI POUR LES AGENTS DE SÉCURITÉ ?
Quant à l’élargissement du port d’armes en France, il pourrait être attribué à de nouvelles catégories professionnelles chargées de veiller à notre sécurité. Et là encore, cela renforcerait le continuum. Car il faut bien le reconnaître, beaucoup d’agents de sécurité restent exclus du périmètre. Alors qu’ils seraient bien utiles !
Cette semaine, l’émission « Panorama » d’Alexandre Carré, nous permet de mieux comprendre comment cet élargissement pourrait être envisagé. Cet entretien avec des experts nous explique comment un port d’armes est attribué aujourd’hui en France, avec ses nombreux verrous qui incluent de la formation, des contrôles médicaux, une analyse des profils et des états mentaux, un fichier des interdits, une certification du CNAPS, et une autorisation du préfet : autant de conditions qui permettent aujourd’hui à la France de ne pas être l’Amérique, une Amérique sidérée qu’un adolescent ait pu acheter plusieurs armes chez un marchand sans éveiller le moindre soupçon.
QUE DIRE DU TRAFIC D’ARMES EN FRANCE ?
En France, on estime qu’il se vend plus de 100 000 armes chaque année.
Mais personne ne prend en compte le trafic d’armes qui est désormais (avec la drogue) l’un des premiers business des banlieues islamisées. Et cet islam politique qui s’arme de Kalachnikov ne semble pas ou peu émouvoir les pouvoirs publics.
Et que dire des révélations de l’écrivain anthropologue Patrick Declerck qui affirme avoir acheté « facilement » en France un fusil Remington 700 (fusil des snipers).
Pour l’obtenir, il a suffi d’une carte d’adhérent à un club de tir, d’un certificat médical et d’un casier judiciaire vierge. Son dernier ouvrage « Sniper en Arizona » en dit long sur cette folie des armes.
Alors ?? La France mieux que l’Amérique ?
Sans doute. Mais il y a aussi un paradoxe.
Les armes circulent et se vendent.
Mais elles ne vont surement pas vers ceux qui en ont le plus besoin.
Selon le CNAPS, il y aurait au maximum 3000 à 3400 agents des forces privées dotés d’une arme. C’est peu, trop peu. Or la France est capable de par sa législation, de maîtriser l’évolution de l’armement chez certaines catégories de professionnels.
Verra-t-on un jour en France, comme à Chicago d’anciens « flics » faire le guet la nuit, avec leur arme dans le holster ?
Ces policiers devenus agents privés arrondissent leur fin de mois avec leur arme. Pour eux, c’est l’illustration d’un continuum qui fonctionne.
La France en proie à une insécurité galopante devrait y songer. Songer surtout à élargir le continuum avec des personnels privés, qualifiés, formés dotés d’une arme, et sans état d’âme.
Eric de Riedmatten
Directeur de la publication : Michaël Lejard
Directeur de la rédaction : Alexandre Carré